ALAN BROWN INTERVIEW


Pourquoi avoir réalisé un film dans l'univers de la Danse ?
AB : Je suis un grand fan de danse. Aujourd'hui, par manque de temps, je n'assiste malheureusement plus à autant de spectacles comme je le faisais plus jeune. Mais j'ai toujours aimé et eu une grande admiration pour cette forme d'Art. Quand j'ai réalisé mon deuxième long métrage << Superheroes >> (2007), j'ai eu l'occasion de tourner une scène, très courte, avec trois danseuses dans un studio de danse. J'ai tellement adoré filmer cette scène que cela m'a donné envie de réaliser un film entièrement dans un studio de danse. Ca sonnait pour moi, à la fois comme un challenge artistique, créatif mais aussi technique.

Comment s'est fait le choix des acteurs ? Cela n'a pas dž être évident de trouver de bons acteurs sachant danser ou, inversement, de bons danseurs sachant jouer ?
Le casting a également été un vrai challenge. Je n'étais pas du tout préparé à cela et ne pensais pas que ce serait aussi difficile de trouver de bons danseurs sachant jouer la comédie. Ce sont deux talents tellement différents et difficiles. D'ailleurs le fait de devoir savoir jouer a effrayé de nombreux danseurs.

A mes yeux, il était évidemment très important de caster un ensemble crédible et réaliste : 5 danseurs répétant avec un chorégraphe dans le but de donner une représentation. Le genre de petite troupe de danse que l'on peut croiser au quotidien.

Pour se faire, j'ai travaillé avec une excellente directrice de casting, Stéphanie Holbrook, qui a aussi casté mes précédents films "Soldat Romeo" et "Superheroes". Jonah Bokaer, le chorégraphe nous a aussi beaucoup aidé et a été présent lors des auditions. L'avoir à nos côtés a été primordial, puisque tous ensemble nous avons pu détecter quelles seraient les meilleures personnes à la fois pour la danse et la comédie.

Comment sont déroulées les auditions d'ailleurs ?
Lors des castings, j'ai demandé à chacun des candidats de performer sur une danse pendant 3 minutes puis de jouer la comédie sur un monologue de leur choix. La plupart des danseurs ont choisi de raconter un moment de leur vie.

Ensuite pour faire notre choix final, j'ai rappelé tous les candidats sélectionnés et ai travaillé uniquement sur le jeu d'acteur avec eux. Tout le monde avait vraiment travaillé dur. J'ai profité de ces auditions pour tous les filmer et voir comment chacun d'entre eux passait à l'écran afin de me donner une idée sur ce que cela rendrait dans le film.

Jonah Bokaer est un chorégraphe internationalement reconnu, Y-a-t-il une raison particulière pour avoir fait appel à lui ?
J'ai été très honoré que Jonah accepte de créer toutes les danses pour le film. Nous nous connaissons depuis une douzaine d'année maintenant et nous sommes rencontrés quand il n'était encore que danseur dans la troupe de danse de Cunningham. J'admire son travail, ses créations, ses chorégraphies tant par leurs rigueurs, leurs beautés que par leurs intelligences. Cela a été une très belle expérience et ça signifie beaucoup de chose pour moi de l'avoir à mes côtés sur ce projet. Nous avons travaillé en total confiance avec beaucoup de respect mutuel, ce qui est un atout considérable. De plus j'ai énormément appris en le regardant mettre en scène ses chorégraphies.

Combien de temps à durer le tournage (entre répétitions d'avant tournage et le tournage en tant que tel) ?
Tout le monde était si préparé et l'équipe si efficace que nous avons au final tourné assez vite le film. Jonah a créé les danses, en 3 jours, la semaine avant le tournage quand nous étions encore en pré-production. Il n'y pas eu de répétitions formelles avec les danseurs. Tout s'est fait en même temps lors de la pré-production. Ceci dit, les semaines, précédent le tournage, j'ai passé beaucoup de temps avec chacun des danseurs à travailler sur leur personnage et l'histoire. C'est la façon dont je travaille habituellement, la façon dont j'aime travailler, en tête à tête avec les acteurs. Et nous avons aussi organisé des diners afin qu'ils puissent partager un peu de temps tous ensemble.

Le casting des acteurs est international, était-ce une volonté de votre part ?
Non, ça s'est fait comme ça, il n'y avait pas de volonté particulière. En fait c'est plus un reflet de la communauté de danseurs New-Yorkais qui viennent d'un peu partout dans le monde pour étudier et travailler ici. Notre petite troupe de danse est donc très réaliste.

Quels sont vos futurs projets ?
Je travaille sur un film musical, ou plus particulièrement sur une comédie << musicale anti-musicale >>, un peu dans la tradition française des films musicaux. Le film s'appellera << Friends & Foes >> (Amis & Ennemis) et raconte l'histoire d'un homme qui a perdu la mémoire après avoir subi un traumatisme crânien lors d'un accident, au point de ne plus se rappeler de sa femme, et tombe amoureux d'un autre homme. L'histoire d'un triangle amoureux classique. Et les personnages chanteront. Je travaille sur le scénario actuellement et espère pouvoir le tourner au printemps 2014.



JONAH BOAKER INTERVIEW


Vous avez créé la chorégraphie de 5 Danses. Est-ce votre première participation à un film?
En fait, je détiens un diplôme en arts médiatiques, et je compose une vidéo annuellement, qui est généralement influencée par la chorégraphie. Dans le passé, j'ai travaillé comme chorégraphe pour d'autres œuvres d'images en mouvement et c'est toujours un plaisir de travailler cinématographiquement. Ma participation dans le domaine de la danse cinématographique a commencé avec Charles Atlas, et l'étude et la compréhension de son approche du genre au cours des 40 dernières années. Comme chorégraphe pour 5 Danses c'était ma première expérience de travail avec le réalisateur Alan Brown, et ce fut également un plaisir. J'ai été impliqué dans le casting, une partie du développement du scénario, et 3 jours de création avec le casting final.

Comment s'est passée votre rencontre avec Alan Brown?
Fait intéressant, Alan Brown et moi nous sommes rencontrés en 1999 à New York: il était une des premières personnes que j'ai rencontrée après avoir déménagé à New York. C'était une coïncidence complète, mais nous étions dans la même classe de yoga et nous sommes rapidement devenus amis. C'est une amitié qui dure au fil des ans, et qui a connu de touchantes nombreuses évolutions. Je me souviens d'avoir lu ses premiers romans, et autres écrits, antérieurs à son travail de scénariste et réalisateur.

Qu'est-ce qui vous a attiré dans 5 Danses?
Il me semble que la plupart des représentations cinématographiques de la danse tombent dans les clichés de simple représentation de danseurs, de chorégraphie basique, et de sujets relativement légers, ou à l'inverse, impliquant des représentations surréalistes ou déformée de la danse comme un objet de cinématique ou comme fantasme de l'auteur. 5 Danses m'a inspiré car il s'agit de vraies personnes: sa représentation des danseurs place les danseurs au centre du récit, et elle est également très réaliste. Les conditions émotionnelles, artistiques, interpersonnelles, et même économiques des personnes qu'Alan Brown créé sont toutes très naturelles pour tous ceux qui travaillent dans une ville comme New York. J'ai également été heureux d'avoir pu être impliqué depuis le début, et d'avoir une telle amitié de longue date œavec le réalisateur.

Comment et qui a choisi les acteurs et actrices?
Le processus a nécessité 4 séances de casting à New York, qui ont impliqué des auditions tant à l'oral que sur le mouvement. J'étais présent à toutes les séances de casting, qui ont été dirigées par le réalisateur, un directeur de casting, et le producteur. De mon côté, j'ai gardé beaucoup de notes sur chaque modèle, et dans de nombreux cas, je suis resté en contact avec des danseurs plus tard, et j'ai suivi leur carrière. Deux des danseurs dans le film, Catherine Miller et Kimiye Corwin, je les avais connu auparavant ou même travaillé dans le passé.

Les scènes chorégraphiées occupent près de 70% du film. Elles prennent toutes place dans le studio de danse. Avez-vous travaillé en tandem avec Alan Brown, chacun mi-chorégraphe, mi-réalisateur?
Je respecte qu'Alan ait pris la décision de filmer 5 Danses dans un vrai studio de danse de NYC (le Bill Young Studio à Soho). Et oui, il semble que la trame du film était de suivre la majorité de l'action à l'intérieur d'un studio de danse. Pour mon rôle dans le projet, j'ai travaillé avec le casting final à CPR - Centre pour la recherche de la performance à Brooklyn- et mis en scène la chorégraphie en 3-4 jours. Je n'étais pas sur le plateau pendant le tournage par la suite. Le film parle des relations sentimentales entre les hommes et les femmes. Les relations impossibles, les relations adultères, les relations sans avenir, et l'émergence d'une relation forte entre les deux danseurs. Votre chorégraphie accompagne chaque étape, elle les construit danse après danse. Comment avez-vous imaginiez la chorégraphie? Quand je construis une chorégraphie, il ya un processus en 8 parties que je suis. Dans le cas de 5 Danses, j'ai travaillé en étroite collaboration avec le réalisateur afin de construire, structurer et soutenir certaines questions thématiques qu'il souhaitait mettre au cœur des intrigues du film. J'ai choisi de travailler dans une palette abstraite avec cependant beaucoup d'interactions compliquées, ce qui permettrait à la réalisation de bénéficier d'une grande quantité de contenu interpersonnelle au sein du groupe de danseurs. Un duo a également été structuré comme une section interchangeable, pour être dansé par les hommes et les femmes, les femmes avec les femmes, ou les hommes avec les hommes. Enfin, j'ai créé un solo pour le protagoniste principal qui ferait repousser ses limites physiques à son maximum et qui a créerait un portrait en mouvement.

Dans 5 Danses, nous avons l'impression que les moments de danse sont les vrais moments de la vie. C'est là qu'est l'action et la construction. Pensez-vous que la danse (comme d'autres arts) exprime la vie et l'amplifie?
Dans ma chorégraphie, l'expression dramatique est dans l'expression physique. Je travaille toujours à dépeindre les artistes eux-mêmes.

La danse amplifie la relation sensuelle entre les personnages du film. Avez-vous chorégraphié également la belle scène d'amour entre les deux danseurs qui se déroule dans le studio de danse? Ryan Steele (Chip dans le film) crève littéralement l'écran. Il a un charisme incroyable. Est-ce la première fois que vous travaillez avec lui?
Ryan Steele est un artiste doué, qui a été invité à travailler dans une nouvelle voie dans ce projet. Encourager Ryan d'explorer de nouveaux états avec sa présence physique et à l'écran était un de mes objectifs dans la création du mouvement.

De manière générale, la personnalité d'un danseur ou une danseuse influence-t-elle votre travail?
De manière générale, je suis intéressé par la création forte de nouvelles chorégraphies développées visuellement qui nous emmènent vers de nouveaux lieux de la danse. De là, je me réjouis de la personnalité et de l'individualité des artistes qui influent sur le travail, et vice versa. L'équipe de 5 Danses était très bien équilibrée, et ce fut un plaisir de travailler avec. Cette expérience de chorégraphe pour un film vous a-t-elle donné envie de recommencer? J'ai toujours aimé le fait de chorégraphier pour le cinéma, et aussi je me réjouis de travailler avec la vision unique des réalisateurs, et en particulier les cinéastes. Travailler avec Alan Brown a été une expérience très harmonieuse.